1948 :
La Nation
lettone doit-elle périr?
Un appel urgent du Conseil National Letton au monde civilisé
Lettre au Conseil fédéral le 25 juillet 1940
Son Excellence
Monsieur Pilet Golaz
Président de la Confédération,
Chef du Département Politique Fédéral
Berne, le 25 juillet 1940
Monsieur le Président,
J'ai l'honneur de porter à votre connaissance ce qui suit.
Au mois de juin, le Gouvernement de l'URSS, sous un prétexte futile,
a présenté à mon gouvernement un ultimatum exigeant de
consentir à l'occupation de toute la Lettonie par les forces de
l'armée rouge et demandant la démission du Gouvernement national
letton. Celui-ci s'est vu obligé d'exécuter l'ultimatum.
Quelques jours plus tard, M. Vychinski, vice-président du Conseil des
Commissaires du Peuple de l'URSS, s'installa à Riga et dirigea en fait
toute la politique intérieure de mon pays. Un nouveau gouvernement a
été formé, mais il n'a aucun pouvoir effectif, toutes les
décisions étant prises par M. Vychinski. Après une courte
absence, M. Vychinski a rapporté de Moscou l'ordre de procéder aux
élections les 14 et 15 juillet. Au début, on parla d'élections
directes, universelles, secrètes, proportionnelles et égales pour
les deux sexes. En fait tout se passa autrement, une seule liste établie
par les communistes - voire l'Autorité d'occupation - fut admise et toute
tentative de présenter d'autres listes fut réprimée.
Les électeurs furent invités par radio et par la presse à voter
sous peine de “représailles terribles”, en cas d'abstention, ce qui serait
facile à constater par l'absence dans le passeport d'un cachet prouvant que
la personne en question a mis dans l'urne son bulletin de vote.
Depuis le 21 juin, Riga et tout le pays sont occupés par des forces rouges
considérables. Dans la seule ville de Riga stationnent environ 500 tanks. Les
élections des 14 et 15 juillet, effectuées dans de telles circonstances,
présentent une falsification manifeste de la volonté du peuple letton.
Le “parlement” réuni le 21 juillet à Riga n'est donc pas constitutionnel,
ni révolutionnaire et n'a pas le moindre caractère de légalité.
Il présente simplement le résultat de l'agissement illégal du pouvoir
Pour cette raison, toutes les décisions prises par ce parlement fantoche à
Riga, y compris la décision demandant l'incorporation de la Lettonie dans l'URSS,
sont nulles et non avenues.
Considérant ce qui précède et au nom de la justice et du droit
imprescriptible des petites nations de vivre libres et indépendantes, je prie
le Conseil Fédéral de ne pas reconnaître l'incorporation de la Lettonie dans
l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'assurance de ma très
haute considération,
J. Feldmans
Envoyé extraordinaire et ministre
plénipotentiaire de Lettonie en Suisse et au Danemark. Délégué
permanent auprès de la Société des Nations.
Source:
Divers, Júlijs Feldmans (ouvage collectif de souvenirs sur J.Feldmans), Ed. Vaidava, 1963,
p.195
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